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Comment créer un design system accessible et évolutif pour une petite équipe produit

Comment créer un design system accessible et évolutif pour une petite équipe produit

Créer un design system accessible et évolutif quand on est une petite équipe produit paraît souvent hors de portée : manque de temps, ressources limitées, priorités produit qui changent au quotidien. Pourtant, un design system bien pensé n'est pas un luxe réservé aux grandes entreprises — c’est un accélérateur de qualité et d’autonomie qui, à moyen terme, économise du temps et diminue la dette technique. Je détaille ici une méthode pragmatique que j'ai testée et adaptée à des équipes de 3 à 8 personnes, avec des outils courants comme Figma, Storybook, React et quelques utilitaires CSS.

Commencer par ce qui compte : principes et objectifs

Avant de créer des tokens ou des composants, définissez 3 à 5 principes qui orienteront toutes les décisions. Pour un design system accessible et évolutif, je recommande par exemple :

  • Accessibilité : respecter WCAG 2.1 AA comme minimum, prioriser le contraste, la navigation clavier et les rôles ARIA.
  • Clarté : composants prévisibles et comportement documenté.
  • Performance : éviter les styles lourds et privilégier la modularité.
  • Scalabilité : faciliter l'extension sans casser l'existant.
  • Autonomie : rendre facile l'utilisation du design system par développeurs et product owners.
  • Ces principes servent de garde-fous : quand un choix technique ou esthétique divise, retournez-y.

    Design tokens : la base du système

    Les design tokens sont le langage commun entre designers et développeurs. Pour une petite équipe, je conseille de commencer par un set réduit et pragmatique :

  • Couleurs : palette primaire, secondaire, états (hover/active/disabled), et tokens pour le texte/fond.
  • Typographie : familles, tailles, interlignes, poids et échelles (h1, h2, body-1).
  • Espacements : échelle modulaire (4px, 8px, 16px…)
  • Rayons, ombres, bordures
  • Stockez ces tokens dans un format réutilisable (JSON ou YAML). Outils recommandés : Figma Tokens plugin pour synchroniser avec Figma, style-dictionary pour transformer les tokens en variables CSS, SCSS, JS, iOS/Android. Conserver un dépôt unique (monorepo ou package npm privé) qui expose les tokens évite les dérives entre design et code.

    Construire des composants atomiques et accessiblité dès le départ

    Je privilégie l'approche atomique : atoms → molecules → organisms. Pour une petite équipe, limitez-vous aux composants essentiels au départ : boutons, inputs, cards, modals, forms, nav. Chaque composant doit contenir :

  • Un fichier UI dans Figma (variantes et états).
  • Un composant réutilisable en code (React/Vue) avec props claires.
  • Tests d’accessibilité et visuels (Storybook + axe-core).
  • Accessibilité pratique : ajoutez systématiquement les attributs ARIA pertinents, prévoyez les états focus visibles, vérifiez la navigation clavier (tab order) et implémentez des rôles sémantiques. Par exemple, un composant Modal doit gérer le focus trap, restaurer le focus après fermeture, et être lisible par les lecteurs d’écran.

    Documentation vivante et exemples d’usage

    La documentation est souvent ce qui manque le plus. Pour une petite équipe, privilégiez :

  • Une story par composant dans Storybook : shows, states, playground.
  • Des snippets d'exemple (JSX/HTML) et des "do/don't".
  • Guides courts : quand utiliser X plutôt que Y, conventions de nommage, pattern d’accessibilité.
  • La documentation doit être accessible depuis le produit (lien dans le repo, page interne) et suffisamment concise pour être consultée rapidement. J'aime bien un "cheat sheet" imprimable ou un fichier README par package.

    Gouvernance légère : qui prend les décisions ?

    Pour éviter l'anarchie sans instaurer un comité lourd, mettez en place une gouvernance simple :

  • Un responsable produit/design qui tranche sur l’usage et la cohérence.
  • Un propriétaire technique qui valide les impacts performance et standards frontend.
  • Des règles de contribution : petites PRs, template de PR, checklist d'accessibilité obligatoire.
  • Les revues de PR deviennent l'occasion d’éduquer plutôt que de censurer ; documentez les patterns acceptés pour réduire les allers-retours.

    Versioning et release : stabilité pour l’équipe

    Adoptez une stratégie de versioning claire (SemVer) même si vous êtes petits. Publier des releases mineures permet d’introduire des améliorations sans casser l’existant, et des major releases pour les breaking changes. Utilisez un changelog automatisé (conventional commits + standard-version) pour que chacun sache ce qui change.

    Tests automatisés et checks d’accessibilité

    Investissez tôt dans des tests qui vous font gagner du temps :

  • Tests unitaires pour la logique des components.
  • Tests visuels (Chromatic, Percy) pour attraper les régressions UI.
  • Checks d’accessibilité automatiques via axe-core dans Storybook et CI.
  • Ces tests permettent de refuser automatiquement les PRs qui introduisent des régressions d’accessibilité ou visuelles, un point crucial quand on a peu de temps pour des revues manuelles approfondies.

    Outils et stack recommandés pour une petite équipe

    Voici une stack efficace et légère que j'utilise souvent :

  • Design : Figma (+ Tokens plugin)
  • Documentation : Storybook (docs + stories)
  • Code : React + TypeScript (meilleure sécurité), Tailwind CSS ou CSS Modules selon le projet
  • Token pipeline : style-dictionary ou Token Transformer
  • Tests visuels : Chromatic (gratuit pour repos open source) ou Percy
  • Accessibilité : axe-core, jest-axe, Lighthouse
  • Le choix dépend de vos compétences internes. Par exemple, si vous avez peu de développeurs frontend, Tailwind peut accélérer le développement en réduisant le nombre de composants CSS à maintenir.

    Adopter une culture d’amélioration continue

    Un design system n'est pas un produit fini mais un produit en constante évolution. Pour qu'il reste pertinent :

  • Planifiez des itérations courtes (sprint de 2–4 semaines) pour ajouter ou améliorer des composants prioritaires.
  • Recueillez régulièrement les retours des devs et designers via des tickets ou un canal Slack dédié.
  • Organisez des revues trimestrielles pour réévaluer les principes et la roadmap.
  • Ces rituels permettent de garder le système aligné avec les besoins réels du produit sans le laisser se fossiliser.

    Quelques erreurs à éviter

    Pour conclure (sans conclure), voici les pièges que j'ai vus souvent :

  • Vouloir tout faire d'un coup : commencez petit et itérez.
  • Négliger l'accessibilité au début : corriger après coûte beaucoup plus cher.
  • Manquer de documentation pratique : sans exemples d'usage, les composants ne seront pas adoptés.
  • Absence de gouvernance : le design system diverge rapidement si personne n'arbitre.
  • Si vous gardez ces points en tête, votre design system aura toutes les chances de devenir un véritable accélérateur pour votre petite équipe produit.

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